Se lire au féminin

Gran Paradiso – Françoise Bourdin

Gran Paradiso, Françoise Bourdin

Pour être tout à fait honnête, la couverture m’a attirée avant d’avoir lu la quatrième de couverture, happée par ce regard si intense. J’étais très curieuse de découvrir ce qu’il avait à nous dire.

Le résumé :

Lorsque Lorenzo décide de changer de vie pour construire son propre paradis, c’est dans le Jura qu’il s’installe, sur les terres que son grand-père lui a laissées en héritage. Des dizaines d’hectares de friches sur lesquels ce jeune vétérinaire pose la première pierre du parc animalier de ses rêves, où les espèces évolueront au plus près de leur habitat naturel.

Ce pari fou suscitera admiration ou hostilité, mais Lorenzo, aidé de ses proches et de son équipe, sera prêt à tout pour faire vivre son jardin d’Eden.

Mon avis et ressenti :

Une lecture captivante dans laquelle s’entremêlent tous les rêves de jeunesse de Lorenzo : construire et faire grandir le parc animalier qui lui tient tant à coeur sur les terres de son grand-père décédé, dont il garde un souvenir vif et tendre. Ces hectares de terre en friches représentent le lien avec ses racines italiennes et maternelles. Son projet de vie, son ancrage le plus fort. Il y investit désormais chaque jour sa vie,  son temps, son énergie. Il souhaite développer un parc animalier à sa façon, loin des principes classiques d’un zoo. Et sa force sera de refuser toutes les tentations et autres recommandations qui lui soufflent d’agrémenter le parc d’animations et de jeux pour enfants. C‘est hors de question. Et Lorenzo ne cédera pas, quand bien même les rentrées d’argent seraient les bienvenues. Financièrement, le parc est un gouffre, Lorenzo en vit difficilement pour lui-même une fois toutes les dépenses et salaires épongés. Qu’importe, le bien-être animal est sa priorité, au diable tout ce qui pourrait détourner les visiteurs du but de leur découverte: voir évoluer la faune sauvage aussi librement que possible.

Mis à part son beau-père Xavier, avec lequel les relations sont très complexes et tendues depuis son enfance, sa mère, ses demi frères et soeurs et Julia le soutiennent de manière inconditionnelle. Son jeune frère, Valère, l’aide même à trouver des sponsors. Par cjance, Lorenzo est très entouré et peut compter sur ses proches. 

Ses préoccupations sont aussi tournées vers Julia et sa reconquête. Son grand amour de jeunesse. Après des années de relation et de passion, leurs chemins se sont séparés quand Lorenzo a accepté un stage en Afrique, à la fin de leurs études à Maison-Alfort. À ce moment-là, la mère de Julia est tombée gravement malade et la jeune femme s’était sentie débordée, abandonnée par Lorenzo. Tout en comprenant sa démarche, elle lui en voulait de ne pas repenser ses priorités… Elle a eu peur de l’avenir, peur des sentiments de Lorenzo pour elle, qu’elle a remis en question. C’est compréhensible.

Leur séparation brutale a laissé des empreintes indélébiles dans le coeur de chacun, les empêchant de refaire leur vie. 

Vétérinaire comme lui, Julia est embauchée auprès de Lorenzo pour le seconder. Une annonce pour travailler dans ce nouveau parc l’avait interpellée; se rapprocher de Lorenzo ? Pourquoi pas, en tout bien tout honneur et, surtout, pour le travail.

Lorenzo est une force de la nature, un homme entier, dévoué, honnête et droit. Son amour pour son travail, sa passion pour les animaux sauvages et leur respect, leur bien-être, leur préservation tant que faire se peut, la nature; sa droiture et sa fidélité caractérisent ce personnage haut en couleurs. Je me suis sentie bien en sa présence. En confiance. En sécurité. Les femmes qui l’entourent professionnellement l’ont bien compris. Mais une seule compte plus que tout… 

Dès son plus jeune âge, la vie l’a bousculé, meurtri. Il avance cependant, avec courage et détermination, contre les vents défavorables parfois. 

En le découvrant au fur et à mesure, je me disais bien qu’il progressait chaque jour un peu plus vers lui-même, fidèle à ses convictions et que la vie lui réservait de beaux cadeaux.

Celui de l’accomplissement, de l’épanouissement. 

Car je reste convaincue que, malgré notre besoin vital de relations humaines, aucune d’entre elles ne viendra nourrir de façon satisfaisante notre besoin de nous réaliser. Avant tout pour nous-même et indépendamment de quiconque.

L’amour est l’un des fils conducteurs de cette histoire ; jamais éteint, simplement malmené, il retrouvera sans doute sa place au moment opportun. Et j’aime imaginer la suite… 

Comme j’ai aimé l’atmosphère autour du parc, entouré d’une nature sauvage, généreuse, qui ne trahie jamais, elle. 

J’ai aimé ce roman qui parle d’ancrage, de racines, d’environnement à préserver d’urgence, comme une invitation à regarder l’essentiel dans nos vies, loin des turbulences qui nous feraient facilement perdre de vue le sens.

Je suis définitivement fan des romans de Françoise Bourdin, qui comptent tous un subtil mélange d’histoires et secrets de famille, jalousie, rancoeur… le tout enveloppé d’amour, toujours, celui auquel chacun d’entre nous aspire.

Quelques citations :

« Entre Lorenzo et Xavier, l’animosité était réciproque depuis toujours. Pour séduire Maude et l’épouser, Xavier avait été contraint d’accepter la présence de ce petit garçon de trois ans, joli comme un coeur, mais il n’avait pas réussi à s’y attacher. Pressé d’avoir ses propres enfants, il avait laissé Maude s’occuper du gamin, et plus elle le dorlotait plus il se sentait agacé. »

« Ses mauvais rapports avec Xavier en avaient fait un garçon renfermé, secret, mais sous sa carapace d’indifférence, il était très sensible. »

« Ce projet grandiose, qui semblait réaliste au vu des capitaux à trouver, Lorenzo en fait souvent et longtemps discuté avec Julia, sa passion de jeunesse. Ils s’étaient rencontrés durant leurs études à Maisons-Alfort, étaient tombés sous le charme l’un de l’autre et avaient vécu une belle histoire. Peu à peu, les longs stages de Lorenzo aux quatre coins du monde avaient lassé Julia, qui ne se satisfaisait pas de ses trop brefs retours. »

« J’attends un enfant, annonça-t-elle d’une toute petite voix. Lorenzo reçu la nouvelle comme un uppercut. Il avait beau connaître et respecter sa relation avec Marc, il s’apercevait que, contre toute logique, il lui était resté une petite lueur d’espoir au fond du coeur. »

«  Il avait voulu lui cacher sa déception, mais elle le connaissait trop bien et elle avait facilement deviné qu’il n’était pas détaché de cet amour de jeunesse qui avait tant compté pour lui. »

« Pourquoi restait-il seul ? Il était conscient d’avoir laissé sa passion des animaux prendre toute la place, ce qui finirait par provoquer un déséquilibre dans son existence. »

«  Il fallait vraiment que Julia se reprenne, qu’elle chasse ses idées sombres, qu’elle voit l’avenir sous un jour stimulant. Elle se demande si elle était heureuse, mais se poser la question était déjà très inquiétant. »

« Chaque qu’elle pensait à son départ du parc, elle se sentait triste, et chaque fois qu’elle essayait de se projeter dans l’avenir avec Marc et le bébé, elle éprouvait une sourde angoisse. »

« On ne bâtit pas ravie sur un coup de coeur. J’ai eu tort de le croire. Tort de me précipiter pour tout faire avec Marc… En principe, je suis plus réfléchie, moins impulsive. Je n’ai pas su attendre et je le regrette. Aujourd’hui, je me sens prisonnière. Pour me libérer, je vais devoir faire souffrir un homme que j’aime beaucoup. Mais aimer beaucoup ne signifie rien quand on est amoureux, n’est-ce pas ? »

« Lorenzo ne confondait-il pas passé et présent, tendresse et amour, souvenirs et regrets ? D’ailleurs, pas seulement des regrets mais aussi des remords d’avoir mal agi avec Julia à l’époque où elle avait besoin de lui. »

À très vite.

Magali

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